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premier matin

Publié le par Za

premier matin
premier matin

Des alboumes comme celui-ci, il ne vous en tombe pas entre les pattes tous les quatre matins. La rentrée est passée - elle finit toujours par passer, et on prend l'habitude de se lever le matin, de prendre la route, le cœur léger ou pas. Petit ours ne veut pas aller à l'école. Rien de nouveau, direz-vous. Si, il y a du nouveau. Il y a Fleur Oury qui signe ici son premier album. Et je suis sciée. Dès la page de garde.

premier matin

Grand ours(e) accompagne le petit sur le chemin de l'école, ce chemin sur lequel on grandit avant même d'avoir rencontré ses pairs. Fleur Oury a tout compris de la boule au ventre, de l'envie irrépressible de rester trop petit pour aller à l'école. Tout est dans le geste, simple et quotidien. Les regards changent, on apprivoise l'inquiétude, doucement, à coup de phrases bienveillantes. Et lorsque le petit ours arrive, il n'est plus si petit, il n'est plus tout à fait le même. Il est prêt. Il a appris la curiosité qui transcende la crainte.

premier matin

Je ne suis pas une technicienne de l'image. Je ressens plus que je n'analyse et ces dessins au feutre m'ont happée. La robe des ours, est mouvante, profonde. Les regards sont précis, parlants. Le chemin se peuple doucement et la classe entière arrive à bon port.

premier matin

Le texte se la joue à l'économie, quelques phrases, juste ce qu'il faut, là où un dessin est plus efficace. Rien de redondant, un chemin qui se déroule sans arrêt, sans retour en arrière. Une perfection, vous dis-je.

premier matin

Il émane de ce livre une intelligence, une douceur, une bienveillance qui vous tirerait des larmes. Premier matin est une évidence. Et Fleur Oury est une auteure à suivre d'urgence.

Premier matin
Fleur Oury
Les fourmis rouges, août 2015

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l'arbragan

Publié le par Za

l'arbragan

Bertolt et le petit garçon sont amis. Bertold est un arbre. Et après ? Cela n'empêche pas les rendez-vous, les confidences, les jeux. Et il n'a pas d'autre ami, le bonhomme, il est un peu différent des autres garçons. Dès le premier dessin, on s'attache aux basques du héro. Il est vif, plein d'imagination. Il est toujours en mouvement, ce petit gars et l'arbre semble bouger avec lui. Chaque trait du dessin de Jacques Goldstyn les accompagne.

l'arbragan

J'ai toujours hâte au printemps, parce qu'à ce moment-là, son immense feuillage devient une cachette formidable.
Ce n'est pas seulement une cachette mais aussi une maison, un refuge, un labyrinthe, une forteresse.

Au fil des saisons, les jeux changent mais la complicité est la même. L'enfant apprend de l'arbre qui renferme un monde foisonnant.

l'arbragan

L'été, ses feuilles en font un poste d'observation tout à fait discret. Mais justement, un jour, ces feuilles ne reviennent pas et il faut bien admettre qu'il est mort, lui qui semblait indestructible. A sa manière, l'enfant va accepter la mort de l'arbre, va lui rendre un dernier hommage, trouver une façon de lui dire au revoir. La mort de l'arbre est naturelle et le garçon l'accepte naturellement.
Le crayon de Jacques Goldstyn brosse avec bienveillance et humour l'entourage de l'enfant, il donne vie à ses deux personnages principaux jusqu'au bout.
Et le mouvement du petit homme n'est jamais stoppé, même par la mort de son ami. S'il prend le temps de la réflexion, c'est pour mieux repartir.

l'arbragan

Dans l'histoire, c'est le garçon qui parle, il n'a pas de nom. L'arbre, lui, en a un et c'est ce qui en fait un personnage à part entière. L'histoire n'est jamais triste, au contraire. Et c'est ce qui fait toute la qualité de cet album. Il est tendre, optimiste. Il est à hauteur d'enfant, c'est à dire bien haut, sur la dernière branche, celle où on voit loin.

L'arbragan
Jacques Goldstyn
Les éditions de la Pastèque, 2015

 

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mon école des loisirs #1

Publié le par Za

L'école des loisirs a 50 ans.
Mon école des loisirs est un amour de grande personne. J'ai beau chercher, fouiller les malles et ma mémoire, pas d'album estampillé de la maison sise 11 rue de Sèvres Paris 6ème dans mes livres d'enfant. J'ai découvert l’école des loisirs à l'école, comme il se doit, à l'IUFM, pour être précise, l’école des professeur-e-s d'école. Là-bas, on y parlait de cette maison d'édition et pratiquement que d'elle, avouons-le. Mais qu'importait alors puisque je n'y connaisssais pas grand chose, qu'il était question de Philippe Corentin, Claude Ponti ou Tomi Ungerer et que s'ouvrait devant moi une autoroute sans fin que je parcours encore : l'alboume.

Philippe Corentin - Montreuil 2014

Philippe Corentin - Montreuil 2014

Avec le temps, on devient exigeant et comme toutes les amours, celle-ci se teinte parfois d'agacement lorsqu'on pense que l'autre n'est parfois pas à la hauteur de l'amour qu'on lui porte. On se fâche, on boude, on revient, on se retrouve. Mais on s'aime, toujours et encore. Et puis il se trouve que le plus grand alboume de tous les temps est édité en France par l'école des loisirs. Reconnaissance éternelle.

mon école des loisirs #1

Maurice Sendak
Where the wild things are

Max et les maximonstres

1963, Where The Wild Things Are paraît aux Etats-Unis - à noter que les Italiens ont le nez creux et le traduisent la même année.
1967, Max et les maximonstres débarque en France, publié par Robert Delpire.
1973, l'école des Loisirs en rachète les droits et le réédite.

Max et les maximonstres pourrait être l'alpha et l'omega de l'alboume, le sésame qui ouvrirait une vie entière de lecteur, le livre après lequel plus jamais on n'aurait de faiblesse pour la moindre mièvrerie, la moindre cucuterie éditoriale.
Tout y est : la liberté du propos, le génie du dessin, l'invention sans limite, le respect du lecteur - qu'il soit enfant ou adulte, l'articulation texte/image si simple et si complexe, le travail d'équilibriste que réprésente la narration de ce voyage fantastique.

mon école des loisirs #1

Max et les Maximonstres est devenu au fil des années un classique incontesté. Mais, célébrer l'école des loisirs, c'est aussi remettre le projecteur sur des albums moins connus. Il en est un à qui j'ai déjà consacré une chronique mais j'y reviens parce qu'il a une filiation évidente avec Max, celle du voyage imaginaire, du lit qui devient un navire.

mon école des loisirs #1

Comme Max, l'Endroit rêvé prend le pari de l'intelligence de son lecteur, ne lui assène pas une histoire de manière péremptoire mais lui laisse le loisir de flâner, d'interprêter. Cet album de 2008 n'est pas épuisé, on peut encore l'acheter, le lire, le faire lire, l'interroger, le faire vivre.

mon école des loisirs #1

Max et les maximonstres
Maurice Sendak
L'école des loisirs, 1963-1973-2015

L'endroit rêvé
Alex Cousseau & Philippe-Henri Turin
L'école des loisirs, 2008

Cette rentrée verra la réédition de 3 autres albums de Maurice Sendak. Cela ne se voit peut-être pas à l'écran mais j'en trépigne d'impatience.

mon école des loisirs #1

Et puis comme un billet ne peut suffire, bientôt le deuxième épisode de mon école des loisirs ! Il sera consacré à des romans et contiendra une déclaration d'amour. Si, si.

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un pic, un roc, un tas de riz, un grand cerf et Pythagore

Publié le par Za

Ils sont grands. Très grands, ces alboumes de monsieur Dedieu. 38x28cm, autant dire 38x56cm une fois ouverts. Des coups à se faire une cabane avec. Des pages cartonnées, blanches et noires de dessins démesurés. De quoi de perdre, se noyer. Une lecture en immersion totale, qu'on démarre avec des petits cailloux dans la poche. Des coups à ne jamais en revenir.

"Pinicho oinichba" et "Une souris verte" sont à venir.

"Pinicho oinichba" et "Une souris verte" sont à venir.

Les illustrations attirent l'oeil et l'attention. On connait le talent protéiforme de Thierry Dedieu, jamais là où on l'attend. Le dispositif témoigne de la grande maîtrise de son auteur, l'image et le texte s'emboitent à merveille, le choix de la typographie est esthétiquement parfait.

Visez l'air étonné du cerf...

Visez l'air étonné du cerf...

Et puis les textes.
Depuis que la chevillette choit, on sait que ce n'est pas la compréhension immédiate du texte qui emporte l'adhésion des foules enfantines, c'est aussi la musique des mots, le jeu des sonorités. Fiston 1er se délecte des Fables de la Fontaine depuis bien longtemps, disait la Cigale et la fourmi avec gourmandise, sans en saisir la moitié.
Les textes ici associés aux grandes illustrations noires et blanches sont pour le moins inattendus. Mais pas tous. Il y a une comptine, Dans sa maison un grand cerf, un virelangue, Tas de rats tas de riz, jusque-là rien que de très normal. Deux autres pourraient surprendre et m'intéressent davantage. Un roc, un cap, un pic, en d'autres termes, la tirade de Cyrano de Bergerac. Et pourquoi pas ? Le personnage est magnifique, le texte lyrique, musical au possible. Il y a aussi le théorème de Pythagore. On est là au bout de la démarche. Au bord de l'abstraction. Et pourquoi pas ? L'audace de la démarche est respectacle, voire ébourriffante.
Alors imaginez que votre Za, qui déteste au plus haut point la cucuterie parce-que-c'est-tellement-mignon-pour-les-zenfants, qui vomit la mièvrerie parce-qu'il-faut-se-mettre-à-leur-niveau, votre Za, souvent énervée de ce qu'on destine aux minuscules, se réjouit. Et parle d'elle à la troisième personne par la même occasion. C'est pas si souvent, vous permettez. Et ma chronique pourait s'arrêter là, dans un contentement que j'espèrerais communicatif.

un pic, un roc, un tas de riz, un grand cerf et Pythagore

Pourtant, après cet emballement digne des plus préssieux des alboumes de ce Cabas, je m'interroge. Pourkwââââ ? Oui, pourquoi ? Pourquoi parer cette série d'albums réjouissants de la mention 0-3 ans ? Cette indication est à mon sens fort réductrice. Ces albums épatants le resteront largement après cet âge. Il est tout à fait louable d'attirer l'attention sur le fait que les bébés ont le droit aux livres, à la lecture, que lire n'est pas seulement déchiffer des mots. Collez des livres dans les pattes de vos petitous, tout petitous même, vous en récolterez les fruits un jour. Et au-delà de vos attentes même. Mais c'est réduire ce travail que de le borner à un public précis. Ceci dit, si cette recommandation rassure et permets à ces albums d'entrer dans les crèches, pourkwââââ pas ?
En réalité, j'ai un second pourquoi. Pourquoi accompagner ces livres jubilatoires d'atours scientifico-pédagogiques, de tests in vivo...

On voit bien dans le petit film l'intérêt, la curiosité des enfants. Il suffit d'observer en coupant le son. Ceci dit, l'énergie que déploie la dame à partager l'album produirait sans doute les mêmes effets avec n'importe quel autre livre.
Comprenez-moi bien. J'aime beaucoup ces 4 albums. Vraiment. Je trouve l'idée épatante d'un point de vue littéraire. C'est de la littérature de jeunesse au sens noble du terme. Pas besoin de justification. La justification alourdit l'objet, amoindrit le propos.
Cette série est magnifique, innovante, décoiffante. N'est-ce pas suffisant ?

Thierry Dedieu
Dans sa maison un grand cerf
Triangle de l'hypoténuse
Tas de riz, tas de rats
Un roc pic un cap péninsule
Seuil Jeunesse
mars 2015

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Le pirate et le roi

Publié le par Za

Le pirate et le roi

Jehan 1er, roi replet, fait naufrage. Il échoue sur une île déserte pas déserte, puisque Matt le pirate tout maigre y vit déjà. L'énervement inaugural et réciproque cède la place à un échange fructeux. Tellement fructueux que les deux personnages se rapprochent au point de se confondre...

Le pirate et le roi

Jean Leroy et Matthieu Maudet transforment cette situation robinsonnesque classique en une confrontation jubilatoire. Depuis la Fontaine, on sait que le lion est noble, mais ces deux-là sont aussi naïfs, roublards, enragés, sacrément tenaces. On s'interroge tout au long du livre sur la nature de chacun, jamais figée, roi, pirate, faux semblants.

Le pirate et le roi

L'humour qui parcourt l'album donne lieu à une lecture haute en couleur, portée par des dialogues ravageurs. La lutte des classes prend une tournure inattendue et c'est à savoir qui dominera l'autre. A mi-chemin entre l'album classique et la BD, Le pirate et le roi est une histoire alerte, juste grinçante comme j'aime.

Le pirate et le roi
Jean Leroy & Matthieu Maudet
L'école des loisirs
avril 2015

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Sophie et sa courge

Publié le par Za

Tout d'abord, permettez-moi de vous avouer que j'aime le mot courge. Je le préfère largement à potiron, même si je sais que les deux termes recouvrent des réalités botaniques bien différentes. Et puis chez moi, on ne dit pas "j'ai préparé un potage au potiron", mais "j'ai fait une soupe de courge", ce qui a le mérite, à mon sens, d'être direct. Et même si peu vous chaut - du verbe chaloir, il fallait que ce soit dit.

Sophie et sa courge
Sophie et sa courge

Sophie a une courge. Certains ont un hamster, un chat, une poupée, Sophie a une courge. A vue de nez, j'irai jusqu'à dire que c'est un butternut, c'est vous dire si je suis balèze en courges. Bref, au lieu de la manger, elle s'en entiche. J'en connais qui ont fait ça avec des lapins. Sophie dorlote sa courge, l'appelle Bernice, la traine partout avec elle. Sophie et Bernice deviennent inséparables, s'amusent follement.
Mais il faut se rendre à l'évidence, Bernice est périssable et commence même à pourrir légèrement. L'hiver est là, et la courge doit retourner à la terre. Pour renaître.

Sophie et sa courge

On connait l'art d'Alice Wilsdorf pour les bouilles irrésistibles et cet album ne déroge pas à la règle. Une succession de simples, doubles pages et de vignettes remuantes donne son rythme à l'histoire.

Sophie et sa courge

Les saisons passent, les manches rallongent, un petit gilet et zou, c'est l'hiver, l'attente du tendre dénouement. Le côté décalé de la situation de départ éveille la curiosité et fonctionne jusqu'à la dernière page. Un album tendre et frais ! ( j'ai dis frais ?)

Sophie et sa courge
Pat Zietlow Miller & Anne Wilsdorf
Kaléidoscope
mars 2015

Sophie et sa courge

Et comme cette histoire m'en rappelait une autre, j'ai demandé à Fiston 1er, archiviste de la famille, qui m'a ressorti un de ses vieux Tralalire sur le même thème, Yaci et sa poupée de maïs (René Escudié/Natacha Sicaud - n°67/juin 2006).

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le panier à pique-nique

Publié le par Za

le panier à pique-nique

Le goût de l'album, du beau livre illustré, lorsqu'on le conserve en étant adulte, c'est sans doute pour la promesse d'émerveillement, pour ce moment délicieux où l'on tient entre les mains un bel objet, fermé encore. Devant la couverture, on fait durer encore un peu le plaisir, parce que cette frimousse rouge, attentive, ce hérisson glouton, le trait, les couleurs, on sait d'avance qu'on risque de se régaler. Avec le temps, on commence quand même à se faire une petite expérience. Et cet album-là nous emmène au-delà de la dite expérience.

le panier à pique-nique

C'est une histoire simple et universelle. La petite rouge en robe jaune découvre un jardin tout en géométrie délicate, en superposition de couleurs inattendues, un jardin qui aurait pu être dessiné par Charley Harper. Ce jardin a un jardinier, ce jardinier a un panier à pique-nique dans lequel la petite va chaparder des mets succulents, préparés avec amour. Ce sont des choses qui ne trompent pas. La nourriture préparée avec amour est différente. Et si elle réparait son emprunt en préparant à son tour un pique-nique ? 

le panier à pique-nique

De ce jeu bienveillant nait une complicité discrète, sans mot. On fait connaissance à distance, on s'apprivoise l'air de rien, et tout se met en place, une pierre puis l'autre, un regard, un cadeau. Les grands aplats du rouge de la peau et des tomates, le bleu, le jaune, le jardin au soleil, tout traduit la générosité du propos.

(Si jamais cette image devenait une affiche... )

(Si jamais cette image devenait une affiche... )

C'est une histoire douce qui vous laisse avec le sourire, et l'envie de replonger dans les grandes et somptueuses images de Susumu Fujimoto pour y retrouver le hérisson, le hibou et les autres bestioles, spectateurs comme nous de l'adoption qui se joue.

Le panier à pique-nique
Gabriele Rebagliati & Susumu Fujimoto
Grasset Jeunesse, mai 2015

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alpha

Publié le par Za

alpha

1956, naissance de l'alphabet phonétique de l'OTAN, appelé aussi code alpha international. Une lettre, un mot. Un abécédaire, donc. Et Isabelle Arsenault qui s'en empare pour en faire un album à part.

alpha

Elle propose une lecture-millefeuille qui va bien au-delà de la simple illustration, nécessitant parfois l'association adulte/enfant. Ce chapeau melon, cher minuscule, viens ici que je t'explique... Et ces deux-là, quelle histoire !

alpha
alpha

Au fil des pages, on est attendri, amusé, et l'on partage de petits morceaux de cinéma, de géographie, de mode, de littérature, de souvenirs aussi. On transmets, on s'amuse.

alpha

L'air de rien, il va en falloir du temps pour profiter de cet album. Alpha, c'est comme un bon tour qu'on jouerait au lecteur qui se dit qu'un abécédaire, c'est vite lu. Naïf qu'il est.

Alpha
Isabelle Arsenault
La Pastèque, 2015

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heure bleue

Publié le par Za

heure bleue

Le jour s'éloigne... bientôt la nuit.
Entre les deux, elle passe...
C'est l'heure bleue.

heure bleue

C'est dans cet interstice infime que se glisse Isabelle Simler avec cet indescriptible imagier. Et il s'en passe des choses, durant ce crépuscule. Un nuancier ouvre le livre, 32 nuances de bleu, du bleu dragée, au bleu nuit. Tout un tas de bestioles se presse, dans l'air, sous l'eau, chacun darde son regard au fur et à mesure que le jour décline. La nuit tombe, elles ne sont plus que noires silhouettes.

heure bleue

Isabelle Simler est une valeur sûre de l'émerveillement, mais avouons-le, avec cet album, on est plus proche de l'uppercut visuel. Les majestueuses doubles pages donnent envie de s'approcher, le nez dans le papier, pour scruter chaque détail, chaque trait. C'est un travail de virtuose, magnifié par une qualité de papier, d'impression qui laisse rêveur. Bref, tout cela est simplement à tomber par terre, mais bien calé sur un tapis moelleux avec des coussins, histoire de pouvoir continuer à lire.

heure bleue
heure bleue

heure bleue
Isabelle Simler
éditions Courtes et longues
mars 2015

Gaëlle est sous le charme, la Soupe de l'espace n'en revient pas...

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Fadoli

Publié le par Za

Autant vous l’avouer, Marie-France Zérolo et moi, on se connaît en vrai, on ne s’est même pas rencontrées au bord du Cabas - parce qu’elle vit au bord d’un volcan, c’est vous dire ! Tout ça pour vous expliquer que ça va être une interview décontractée  comme tout, où on se tutoie en buvant des choses – enfin du thé.

Voici donc Fadoli, son troisième album aux éditions Courtes et Longues. Comme pour les précédents, Mathilde Magnan a chaussé ses crayons de sept lieues et nous en met plein la vue.

Fadoli

Le Cabas de Za – Je peux dire sans me tromper que Fadoli est, de loin, ton album le plus personnel…

Marie-France Zérolo – Oui ! C’est le tout premier texte fini que j’ai écrit…il y a 12 ans. L’écriture est un moyen que j’ai trouvé pour transformer les « maux » en « mots ». Je suis psychomotricienne de profession et je reçois beaucoup de personnes, disons, abîmées corporellement et/ou psychiquement. J’ai besoin de soupapes parfois pour  transformer ce qu’ils m’adressent.

Fadoli est l’un de ces textes « digestion », sorti tout d’un coup sans rature (ou presque), c’est un élan fort et le seul qui soit à ce point proche de ma profession, et donc de mon quotidien. 12 ans après je me reconnais encore dans ce quotidien et dans cette rencontre avec l’Autre.

Et puis Fadoli, c’est pas seulement l’autre-différent, dans le sens « handicapé », pas du tout, c’est aussi l’autre, étrangement familier dans ses différences toutes banales, et c’est aussi et surtout terriblement purement… moi. Voilà pourquoi c’est mon texte le plus personnel… sans compter le titre aux consonances provençales.

LCdZ – Tu parles d’un texte… Mais justement, dans cet album, il n’y en a pas beaucoup de texte ! Toi qui manie le verbe avec tant de délectation - rappelons-nous  Le héron et l’escargot en alexandrins ! – , as-tu dû te faire violence pour effacer à ce point les mots au profit de l’image ? Comment Mathilde Magnan et toi avez-vous travaillé pour cet album-là ?

MFZ - C’est un texte qui est sorti tout seul : POUF ! Quasiment sans rature. Et quand il a été fini il était… comme plein. Aucune frustration, donc. Il est écrit aussi par les images. Je porte les images depuis très longtemps dans ma tête. Les images étaient floues, dans un registre plutôt fantasmagorique, en gros je savais bien où je voulais en venir…mais il n’y avait que moi. Ce texte a attendu sur le bureau de quelques illustrateurs sans le moindre germe de début d’image. Au détour d’une « foire au tandem » (petit jeu de rencontre virtuelle entre des bouts de texte et des images pour création commune - la dernière chez Lydie Sabourin), Mathilde a attrapé mes premières phrases, et comme on se connaît bien maintenant, elle m’a dit « qu’est-ce que tu entends par là ? », du coup j’ai compris que le texte seul était un peu obscur.

J’ai alors scénarisé une histoire faite d’images, les fées qui ne seraient pas des petites bonnes femmes, le village avec ses « on dit », la colonie de fourmi, l’allumette, l’envol, la montagne dévoreuse, la digestion, le bateau, le naufrage… le bain. Tout ce qui représente certaines angoisses très archaïques rencontrées par des patients (angoisses d’engloutissement et de dévoration, de morcellement aussi, etc..).

Fadoli

MFZ - Avec Mathilde on a parlé  de couleurs, de vide, de pleins, d’éclats, de bouts de corps, de fil, de lumière, de fêlures pour que TOUT raconte et Mathilde a tout su traduire par ses propres images, sa jungle d’idées, tout son petit peuple à elle, ses couleurs travaillées si profondément, ses compositions, sa sensibilité, ses angles de vue…

Ensuite, il  y a notre éditeur qui a aussi tout compris au propos, qui a bien su voir que ce n’était pas un livre « sur le handicap », il nous a demandé plus d’images sans texte par exemple.

LCdZ – J’aime particulièrement la double page où Fadoli est paré d’ailes de papillon. La disproportion entre les ailes majestueuses et le corps accroupi, focalisé sur une minuscule bestiole, est frappante. A contrario, il est parfois représenté en très gros plan, comme fractionné…

Fadoli

MFZ - Elle est magnifique cette image, quand je l’ai découverte j’ai marqué une pause de quelques minutes. Mathilde a vraiment tout interprété avec sa palette d’émotions à elle. L’idée c’était de représenter le corps fractionné, morcelé, pour que la forme rejoigne le fond, et pour que ce soit un « corps qui raconte ». Ce qui est le cœur même de mon métier de psychomotricienne.
Il y a de la grâce dans ces disproportions, il y a de la beauté dans les fêlures. Et je ne parle pas seulement des fêlures du Fada, mais aussi des fêlures de tout le monde, de tout un chacun.

LCdZ - C'est exactement ce qui m'a touchée dans Fadoli. Il parle de nous tous, du pas de côté qu'on peut faire un jour, qu'on a déjà fait, qu'on fait de temps en temps.

Fadoli

Mais sinon, et pour être un peu plus indiscrète, et parce que je n’ai pas tous les jours l’honneur et l’avantage de recevoir une de mes auteures préférées, voici une rafale de questions brèves et senties. Quel est ton état d’esprit du moment, là,  tout de suite ?

MFZ – Je suis fatiguée. Fatiguée de ma petite virée dans le Sud, dans ma famille : qu’est-ce que tu veux, c’est tous des fadas !

LCdZ – Quelles étaient tes lectures d’enfant ?

MFZ – D’enfant ? « Oui-Oui » avec une très grande fierté de les commencer ET de les finir !!!! et des BD : « Boule et Bill », « Astérix », « Gaston Lagaffe » et adolescente : la série des Thorgal. Entre les deux des contes.

LCdZ – Quelles sont tes lectures d’aujourd’hui ?

MFZ – ça fait des années que je ne lis plus que de la littérature jeunesse. J’adore la Fantasy et le Théâtre jeunesse contemporain (Bottero, Mourlevat, Orson Scott Card, Oppel), le point commun étant… la poésie qui émane de l’écriture, des mondes inventés, de la langue, selon.
Et puis l’humour con, donc toujours les BD, Léonard est un génie, Achille Talon, Le Chat.
Harry Potter, de 1 à 7, et les Thorgal, (toujours) en livres de chevet.

LCdZ – Et quand je dis brèves, les questions…
Pourquoi ?

MFZ – Mais sans doute pour la bonne et simple raison, que , lorsque l’on veut aller  plus loin on DOIT ménager ses montures. Donc court. Oui.
Bien.
Bon.

Soit.
De fait.

LCdZ – Où ?

MFZ – Plus loin.

LCdZ – Et alors ?

Eh bé, voui.

Fadoli

Fadoli
Marie-France Chevron Zérolo & Mathilde Magnan
Éditions Courtes et l
ongues, 2015

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