le pot au feu (épopée familiale)
Tout d'abord, un grand merci à Requia qui a eu l'idée de cette saga sur le
pot-au-feu ! Voilà bien une odeur de dimanche ! Voilà bien un sujet éminemment familial ! Et, pour sûr, voilà d'où me vient ce goût immodéré pour le clou de girofle. J'en entends d'ici: " pouah ! beurk ! ça me rappelle le dentiste ! " Certes. Mais moi, ça m'envoie directement chez mes grands-parents, dans une cuisine bleue, au quatrième étage d'un vieil immeuble, 4 place Cassaignol, Narbonne, Aude. |
||
séance de chatouilles dans ladite cuisine en février 74, visez un peu la soupière sur le frigidaire ! |
Mais, parlons peu, parlons bien !
Prenons:
-du boeuf genre fibreux et gélatineux (j'adore et ça sèche moins à la cuisson), Mamie pouvait aussi utiliser du veau, le genre de morceaux qu'on
peut utiliser dans l'osso-bucco, voire mélanger veau/boeuf (je suis nulle en nom des morceaux de viande, mais j'essaie de m'améliorer !),
-1 ou 2 os à moelle (chez nous, c'est 2, Jo adore ça aussi, comme ça, pas de disputes autour de l'os, ça fait un peu trop "Vallée des Mammouths,
sinon...),
- quelques clous de girofle, donc (non, je n'en mets pas toujours trop !!).
- Et la touche familiale, depuis au moins quatre générations, nous autres (Benoit, Chêne, Tisseyre...) on ajoute un bon peu (j'adore cette expression, fréquemment utilisée par ma grand-mère) de
concentré de tomate dans l'eau qui va devenir le bouillon,
- sel.
Je balance tout ça dans une grande marmite, un faitout, je couvre d'eau froide.
Pendant ce temps, j'épluche des carottes, quelques branches de céleri & son coeur, des navets, des oignons, des poireaux et des pommes de terre.
Au bout ... d'un certain temps (je fais ça au pif, mais en tout cas, c'est long !) j'ajoute les légumes, sauf les pommes de terre qui cuisent plus vite et seront ajoutées plus tard.
Je sers viandes et légumes sans le bouillon, avec de la moutarde, des cornichons, des câpres. Traditionnellement, ce plat était suivi d'un morceau de fromage de Laguiole ( prononcer Layole, par pitié !), c'est un genre de Cantal qui arrache (je sais que certains adorent les approximations en matière de fromage...). |
Mais tout l'art (et l'intérêt) du pot-au-feu est la manière dont on accommode ses inévitables restes. Le bouillon, avec ses yeux ou dégraissé, pourra être agrémenté de vermicelles, alphabets, langues d'oiseaux... ou servir de liquide de cuisson pour des macaronis au gratin.
Mamie réservait plusieurs sorts aux restes:
- froids en salade avec de l'oignon rouge cru,
- en ragoût sur une base d'oignons revenus dans l'huile, de câpres et de coulis de tomate,
- en croquettes (ce que je préférais): elle hachait la viande, les carottes, les poireaux et les oignons, leur ajoutait ail & persil, un ou deux oeufs. Avec ce mélange, elle formait des
galettes un peu épaisses (taille 1/2 steak haché), les farinait et les mettait à dorer dans un peu d'huile (on peut les servir avec un coulis de tomates). C'était croustillant, délicieux !
Mais pour ce qui est de l'exploitation des restes de pot-au-feu, personne n'arrivera jamais à la cheville de Sonia Ezgulian, qui en a fait un livre entier, qui se lit comme un roman:
"Rebondissements gourmands d'un pot-au-feu du dimanche au vendredi" (Ed. Tana, collection Food). En passant, sa recette de riz au lait est tout simplement indispensable !
Depuis que je suis aux fourneaux du dimanche, ce pot au feu a subi quelques améliorations variations...
Je remplace parfois le céleri en branche par des morceaux de céleri rave, j'ajoute des gousses d'ail dans leur peau, j'oublie le concentré de tomates (l'aventure !)... Jo a coutume de rapporter
des courses quelques succulents morceaux de... cochon, que je potaufise de la même manière. On retrouve d'ailleurs une recette de pot-au-feu de cochon dans l'épatant "Cochon & Fils" de
Stéphane Reynaud (Ed. Marabout). Le travers de porc de cette idée, c'est que le pot-au-feu de rêve de Jo est en fait une potée: chou, saucisse
fumée... On l'a donc rebaptisé le potée-feu, une espèce d'hybride délicieux...