le coeur cousu
Allez, je me lance.
L’idée, ce n’est pas forcément d’écrire une bafouille sur chaque livre lu. Mais quand même, celui-là… Et ce faisant, en se baladant sur la blogosphère, c’est fou le nombre de billets qu’on a peut trouver sur ce livre ! Moulon de prix (pour un premier roman), bouche à oreille fulgurant… et je n’en avais jamais entendu parler. Alors d’abord, merci à qui me l’a conseillé !
Le cœur cousu, donc.
Le goût du soleil et de la poussière chaude.
Une histoire de transmission d’une mère à ses filles, où l’on hérite de la douleur, mais aussi de la liberté. Frasquita Carasco reçoit le don de coudre, broder, raccommoder les étoffes, les vies, les chairs. Durant toute la première partie, j’ai eu en tête les tableaux de Frida Kahlo : les couleurs, le sang, le cœur cousu dans la poitrine de la Vierge, les enfantements successifs.
La deuxième partie inscrit ce récit intemporel dans l’Histoire (les anarchistes, les allusions à Bakounine). Pour autant, les fantômes, les incantations, les miracles laissent au surnaturel une place centrale dans l'histoire. Mais c’est un surnaturel du quotidien, de l’amour, de l’enfance, du soin prodigué par lequel Frasquita poursuit son œuvre de couturière nomade.
Le dernier tiers du récit se déroule en Afrique du Nord. Une Afrique qui ressemble encore tellement à l’Espagne, escagassée de lumière et de chaleur. Les enfants ont grandi, chacun à sa manière, avec son don/malédiction.
Cette couturière ne pouvait que me toucher, me rappeler à ces liens du fil à coudre, à broder, du fil de laine à tricoter...
Au détour d'une page, un petit chapitre de deux pages, l'air de rien, m'a explosé en plein coeur:
"Des choses sacrées se murmurent dans l'ombre des cuisines.
Au fond des vieilles casseroles, dans des odeurs d'épices, magie et recettes se côtoient. l'art culinaire des femmes regorge de mystère et de poésie.
Tout nous est enseigné à la fois: l'intensité du feu, l'eau du puits, la chaleur du fer, la blancheur des draps, les fragrances, les proportions, les prières,
les morts, l'aiguille, et le fil... et le fil.
Parfois, des profondeurs d'une marmite de fonte surgit quelque figure desséchée. Une aïeule anonyme m'observe qui a tant su, tant vu, tant tu, tant enduré. [...]
Opposant à la réalité une résistance têtue, nos mères ont fini par courber la surface du monde du fond de leur cuisine."
Chaque livre ayant sa petite musique à lui, c’est vers elle que ce roman m’a emportée :