Je dédie momentanément cet article à Mira...
Je suis un genre de gauchère plus contrariante que contrariée qui avait décidé, le jour de ses six ans d'écrire de la main droite, allez savoir pourquoi... Résultat des courses, je fais tout,
mais alors tout, de la main gauche, sauf écrire. Enfin, sauf écrire sur une feuille parce que le jour où il fut question d'écrire sur un tableau noir, ma main droite déclara forfait et c'est la
gauche, qui, toute joyeuse, prit le relais !
Ce livre est une bénédiction pour tous ceux qui, comme moi, n'ont jamais pu apprendre à danser le rock et mettaient cette infirmité sur le compte d'un empôtement définitif, pour tous ceux qui
dessinent les coquilles d'escargots dans le sens inverse des aiguilles d'une montre (c'est un signe), ceux qui ont eu un peu de mal (sic) à apprivoiser le levier de vitesse d'une voiture, ceux
qui ne savent jamais dans quel sens on visse/dévisse et sont pour cela parfois regardés comme de pauvres tarés irrécupérables. Car le gaucher souffre, sachez-le.
Ami gaucher qui me lit, mon frère, ma soeur, si tu as un jour essayé d'apprendre la guitare avec un prof qui levait les yeux au ciel lorsqu'arrivait ton tour, tu n'es plus seul ! J'étais alors
trop jeune et trop inculte pour lui balancer Jimi Hendrix à la tronche !
Le livre de Michel Piquemal, joyeusement illustré par Jacques Azam, bat en brèche toutes les idées reçues sur les gauchers. Car ce n'est pas parce qu'on fiche aujourd'hui une paix royale aux
gauchers que tout est rose. Notre monde est toujours un monde de droitiers, dans lequel les gauchers évoluent maladroitement. Les courts chapitres de cet ouvrage présentent clairement
des sujets aussi épineux que la persécution des gauchers dans nombre de cultures, leurs difficultés d'apprentissage (pas toujours mais quand même), les conséquences de ce lamentable penchant sur
le fonctionnement du cerveau, les avantages qu'il peut y avoir à être gaucher, le traitement de la gaucherie par la religion, par l'école ou pire, par les deux à la fois...
C'est donc avec fierté que je vous annonce que le corps caleux de mon cerveau est plus développé d'environ 11% par rapport au vôtre, si vous êtes droitier ! Que mon excellente représentation de
l'espace fait de moi une personne très douée pour reconstituer des puzzles ! - dommage que ce soit si chiant cette activité m'assomme. Que je
me sers plus harmonieusement des deux hémisphères de mon cerveau ! Que les gauchers se distinguent dans les sports tels que le tennis, l'escrime, le badminton, car leur seule présence tend à
déstabiliser leur gros nigaud d'adversaire droitier.
Ce livre confirme finalement mon sentiment que le gaucher, prenant conscience de son étrangeté dès qu'il pose le pied sur le seuil de l'école maternelle, verra se développer chez lui cette
certitude parfois pénible, mais finalement délicieuse, d'être à part...
Un petit quizz pour terminer cet article...
Parmi les dix candidats du premier tour de cette élection présidentielle,
un seul est gaucher.
Lequel ?
Comme toujours, il y a un poutou à gagner !
Je suis gaucher et alors ?
Michel Piquemal
Jacques Azam
De La Martinière Jeunesse
février 2012