Comment vous dire, comment vous expliquer sans abuser des superlatifs, que j'aime le travail de Paul Echegoyen ? Qué travail ? Son art, ouais !
De ce monsieur, vous n'avez pu louper Le bal des échassiers. Vous ne l'avez pas loupé, hein ? Puis il y eut Baba Yaga, tout de dentelle et d'entrelacs... Le Cabas ayant l'admiration tenace, je guettais patiemment - mais pas trop - l'arrivée d'un nouvel album de monsieur Paul - ça lui va bien, monsieur Paul, non ? Et le v'là !
Momotaro est tout d'abord une suite d'images vertigineuses, somptueuses et chacune mérite qu'on s'y arrête. Ce qui pourrait, avouons-le, ralentir la lecture et irriter un chouïa le lecteur avide de connaître la suite la suite de l'histoire. Lecteur à qui je répondrais simplement : "Lâche ce livre, minuscule adoré, je te le rends demain. Comment ça, j'avais promis de te laisser le lire en premier ? T'es sûr ? Non, mais c'était avant. Avant que je ne l'ouvre." Sachez que l'adulte amoureux d'albums jeunesse se doit à un minimum de mauvaise foi pour survivre. Sinon il peut aussi avoir recours à la menace, mais bon. Ceci dit, je pense maintenant que cette attitude a sans doute contribué au fait que Fiston 1er tienne le livre pour un objet précieux et désirable entre tous. Mais je digresse.
Momotaro, donc. Et le talent immense de Paul Echegoyen, la palette des couleurs, l'infinité de verts, les bleus qui se mettent à flamboyer à l'approche de l'île des diables. Et le héro, taillé à la serpe qui évolue dans une nature d'estampe, généreuse et stylisée.
Momotaro est une légende du folklore japonais, l'histoire d'une espèce de Tom Pouce né d'une pêche pour faire le bonheur d'un couple âgé et sans enfant. Il grandit terriblement, devient un colosse au coeur tendre, toujours prêt à rendre service, même lorsque le seigneur, qui ne doute de rien, lui demande d'aller ratatiner les démons de l'île des diables.
De cette histoire de facture classique, Margot Rémy-Verdier tire un texte élégant et fluide, dont le narrateur ne se dévoile pas immédiatement. Récit à la première personne, présent de narration, choix des mots, tout concourt à rendre l'histoire proche, évidente. La présence bienveillante d'animaux - un chien, un singe et un faisan - accompagne l'épopée de Momotaro. L'histoire se pare alors de quatre héros intrépides, à égalité.
Une belle histoire d'entraide désintéressée, à lire tout petit pour s'immerger dans les grandes images de Paul Echegoyen. Cette somptueuse légende de Momotaro installe le dessinateur parmi les plus grands - si ce n'était déjà fait.
La légende de Momotaro
Margot Rémy-Verdier & Paul Echegoyen
Marmaille & compagnie, 2016